Le 5 novembre 2024 marque une avancée majeure dans la prise en charge des troubles du neuro-développement (TND), dont fait partie l’autisme. Une nouvelle loi, adoptée à l’unanimité par le Parlement français, vise à transformer la manière dont ces troubles sont détectés et gérés, tout en apportant un soutien renforcé aux familles concernées. Voici un décryptage détaillé de cette loi, ses avancées et son impact attendu.
Une loi essentielle pour une meilleure prise en charge
La proposition de loi, intitulée « Proposition de loi visant à améliorer le repérage et l’accompagnement des personnes présentant des troubles du neuro-développement et à favoriser le répit des proches aidants », a été portée par la sénatrice Jocelyne Guidez. Ce texte repose sur un rapport transpartisan du Sénat et introduit plusieurs mesures concrètes pour répondre aux besoins des enfants présentant un TND et de leurs familles.
1. Le repérage précoce des troubles du neuro-développement
La loi innove en instaurant deux examens médicaux obligatoires pour dépister précocement les troubles du neuro-développement :
- À 9 mois, une période cruciale où les délais de développement peuvent être détectés grâce à des évaluations spécifiques portant sur le tonus musculaire, les réactions sensorielles et les interactions sociales de l’enfant.
- À 6 ans, des bilans plus complets sont réalisés, incluant des tests cognitifs, des évaluations comportementales et des examens audiologiques pour identifier d’éventuels troubles d’apprentissage.
Ces examens seront intégralement pris en charge par l’Assurance Maladie, y compris les éventuelles consultations spécialisées recommandées à l’issue des bilans. Les familles recevront également un accompagnement pour mieux comprendre les résultats et les étapes à suivre.
Impact attendu : un diagnostic plus rapide permettant une intervention précoce, souvent déterminante pour le développement des enfants.
2. Un soutien renforcé aux structures d’accueil
La loi implique également les professionnels des crèches et autres structures d’accueil de la petite enfance dans le repérage des TND. Ces derniers seront formés pour identifier des signaux tels que des retards de motricité, des difficultés d’interaction sociale ou des comportements atypiques. Les formations couvriront :
- Les bases des TND et leurs manifestations courantes.
- Les stratégies d’observation et de communication avec les parents.
- La collaboration avec des spécialistes tels que les orthophonistes et psychomotriciens.
En impliquant ces professionnels, la loi garantit un suivi renforcé dès le plus jeune âge.
3. Vers une inclusion scolaire effective
Des dispositifs dédiés à la scolarisation
La loi impose que, d’ici la rentrée 2027, chaque circonscription académique dispose d’un dispositif spécifique pour l’inclusion des enfants présentant un TND :
- En maternelle et élémentaire, au moins un dispositif par circonscription.
- Pour le secondaire, au moins un dispositif par département.
Ces dispositifs incluront des enseignants spécialisés, des AESH (Accompagnants des Élèves en Situation de Handicap) formés, et du matériel pédagogique adapté.
Formation des enseignants
Un des freins à l’inclusion scolaire est souvent le manque de formation des enseignants face aux spécificités des TND. La loi prévoit donc :
- Une formation obligatoire pour les équipes pédagogiques, afin qu’elles puissent mieux comprendre et accompagner les enfants concernés.
- La création de référents à l’inclusion dans chaque établissement.
Impact attendu : une meilleure intégration des enfants dans le milieu scolaire ordinaire, favorisant leur épanouissement et leur autonomie.
4. Un soutien essentiel aux proches aidants
Le dispositif de « relayage »
La loi pérennise le dispositif de suppléance à domicile, connu sous le nom de « relayage ». Ce dispositif permet aux proches aidants de bénéficier d’un répit, grâce à une intervention professionnelle temporaire à leur domicile. Les aidants peuvent ainsi obtenir jusqu’à 120 heures de répit par an, financées par des subventions publiques et des dispositifs de protection sociale.
Les séjours de répit
Des séjours conjoints aidant-aidé sont également prévus pour offrir des moments de repos tout en maintenant l’accompagnement nécessaire. Ces séjours peuvent se dérouler dans des centres spécialisés ou des structures de vacances adaptées. Le financement est partiellement pris en charge par l’État, avec une participation des familles modulée en fonction de leurs revenus.
Impact attendu : une diminution de l’épuisement des proches aidants, souvent laissés seuls face aux défis quotidiens.
Des avancées notables par rapport à la situation actuelle
Cette loi marque un tournant majeur, répondant à plusieurs lacunes historiques dans la prise en charge des TND en France. Voici les principaux points d’amélioration :
Une meilleure détection
Le dépistage précoce est souvent la clé pour un accompagnement adapté. En incluant des examens obligatoires à des âges stratégiques, la France se met enfin au niveau des standards internationaux.
Une inclusion scolaire réellement envisagée
Avec des dispositifs spécifiques et une formation accrue des enseignants, la loi apporte une solution concrète à l’écueil de l’exclusion scolaire, trop souvent vécue par les familles.
Un soutien renforcé aux familles
En reconnaissant le rôle épuisant des proches aidants, cette loi apporte une bouffée d’oxygène à ceux qui consacrent leur vie à leurs enfants ou proches présentant un TND.
Quels sont les prochains défis ?
Malgré ces avancées, des défis restent à relever pour assurer une mise en œuvre efficace de la loi :
- Déploiement équitable des dispositifs : garantir une répartition homogène sur tout le territoire, y compris dans les zones rurales.
- Formations adaptées : s’assurer que les contenus de formation des professionnels répondent aux besoins spécifiques des enfants.
- Financements : allouer les ressources financières nécessaires pour concrétiser ces mesures ambitieuses.
Conclusion
Cette nouvelle loi représente une avancée historique pour les personnes présentant des troubles du neuro-développement et leurs familles. En misant sur le repérage précoce, l’inclusion scolaire et le soutien aux proches aidants, elle pose les bases d’une société plus inclusive et solidaire. Son succès dépendra toutefois de la qualité de sa mise en œuvre et du suivi de ses impacts dans les années à venir