L’histoire de l’autisme remonte à la fin de la première moitié du XXe siècle.
Les premiers à théoriser sur l’origine des troubles autistiques furent les psychanalistes. On citera notamment Bruno Bettelheim, Léo Kanner et Hans Asperger.
Souvent issues des théories freudiennes, ils ont considérés les TSA comme une défense face au monde extérieur.
Ce fut cependant Léo Kanner qui le premier reconnut une origine organique de l’autisme permettant ainsi à la recherche d’étudier les mécanismes de l’autisme et de proposer des prises en charge plus performantes.
Ces recherches ont permis l’essor des neurosciences comportementales.
Nous nous efforcerons de répondre dans cet article aux questions suivantes :
Quelles furent les théories psychanalytiques concernant ces troubles et quel impact ont-elles encore aujourd’hui ?
Quels prises en charge les découvertes de la recherche ont-elles permis de développer ?
Quel avenir pour la prise en charge de l’autisme ?
I/ L’autisme face à la psychanalyse
Pendant longtemps, la psychanalyse a conservé un monopole sur la prise en charge des troubles autistiques notamment en France où celle-ci reste encore quelque peu influente.
Ces conceptions parfois farfelues voire maltraitantes ont empêchées des prises en charge bénéfiques d’émerger pendant un demi-siècle.
Nous traiterons ici essentiellement des trois principaux théoriciens psychanalytiques de l’autisme que sont Bruno Bettelheim, Léo Kanner et Hans Asperger.
1) Bruno Bettelheim
Incontestablement celui qui a fait le plus de mal dans sa conception de cette pathologie (il était surnommé « Brutalheim » par les résidents de l’école d’orthogénie qu’il avait créé à Chicago), Bruno Bettelheim a fait un parallèle entre les réactions des prisonniers des camps d’extermination et les symptômes de l’autisme.
Selon lui, il était causé par une réaction de rejet de la mère qui souhaitait inconsciemment la mort de son enfant. Celui-ci en réaction développait un repli sur lui-même.
Sa théorie a stigmatisé les mères pendant des décennies, allant jusqu’à préconiser trop souvent le retrait de l’autorité à la famille.
Cette conception continue hélas à avoir encore de l’influence dans certaines structures qui n’hésitent pas à faire culpabiliser les mères et à les mettre sous la surveillance des travailleurs sociaux.
Cette vision développée à partir de 1950 fut bien plus radicale que celle de Léo Kanner qui voyait dans l’autisme une cause organique.
Bettelheim expliqua sa théorie dans un ouvrage nommé la forteresse vide. Une phrase de son livre résume à elle seule toute la pensée du psychanalyste : « Tout au long de ce livre, je soutiens que le facteur qui précipite l’enfant dans l’autisme infantile est le désir de ses parents qu’il n’existe pas. »
Vous pouvez aussi en découvrir davantage sur Bruno Bettelheim dans le documentaire de Sophie Robert « Le mur : la psychanalyse à l’épreuve de l’autisme ».
2) Léo Kanner
Psychiatre américain, il a décrit en 1943 les cas de 11 enfants qu’il suivait depuis 1938. Il décrivit l’autisme comme un trouble affectif de la communication et de la relation sans atteinte de l’intelligence.
Contrairement à Bettelheim, Kanner ne considérait pas les parents comme responsables. Cependant, il notait une certaine froideur des mères des enfants qu’il a suivi les qualifiant de « mères frigidaires ». Il faut cependant remettre les choses dans leur contexte à savoir que les enfants qu’il a suivi appartenaient à des milieux plutôt aisés où les relations au sein des familles pouvaient être plus distantes à cette époque.
La forme d’autisme qu’il décrivit prit alors le nom d’autisme de Kanner.
Il a constaté tout comme Hans Asperger une certaine prévalence de cas d’autisme familiaux lui permettant de suggérer une cause organique ou même génétique. Il est le premier à distinguer l’autisme de la schizophrénie et à considérer son apparition comme précoce (dès la naissance) donnant ainsi lieu à la dénomination que nous connaissons encore aujourd’hui d’« autisme infantile précoce ».
3) Hans Asperger
Ses travaux sont longtemps restés dans l’ombre car rédigés en allemand. Il faudra attendre 1981 pour que Lorna Wing, psychiatre britannique spécialisée dans l’autisme, ne les fasse connaître du grand public.
Psychanalyste viennois, Asperger a étudié les cas de quatre garçons présentant un manque d’empathie, des difficultés à se faire des amis ou à établir une conversation dans un but purement social, des intérêts envahissants pour un sujet en particulier ainsi qu’une certaine maladresse (dyspraxie).
Il souligne par ailleurs que l’intelligence de ces enfants pouvait varier au sein d’un même individu de « la débilité au génie ».
Il a décrit des traits autistiques chez certains des parents confirmant l’origine organique de l’autisme.
A la différence des enfants suivis par Léo Kanner, les enfants qu’il a décrit ne présentait pas un retard de langage bien qu’il ait constaté une forme atypique de communication chez eux souvent tournée vers leurs intérêts spécifiques
La forme d’autisme qu’il a ainsi décrit prit le nom de syndrome d’Asperger.
Il est à noter que le terme de syndrome d’Asperger est aujourd’hui devenu désuet en raison notamment de l’implication de Hans Asperger dans le régime de l’Allemagne nazi. Vous pouvez en apprendre davantage à ce sujet sur sa page Wikipédia.
Ces différentes théories ont conduit à mettre en place des thérapies inadaptées voire maltraitantes pour certaines comme le packing (méthode consistant à envelopper l’enfant nu dans des draps humides préalablement placés au réfrigérateur afin de lui faire prendre conscience de son enveloppe corporelle) fort heureusement aujourd’hui interdites.
Il est temps à présent de considérer ce que la recherche a permis de mettre en place pour améliorer la prise en charge de l’autisme.
II/ L’introduction des méthodes comportementales et les recherches sur l’autisme
Léo Kanner et Hans Asperger ayant défini une cause organique à l’autisme, leurs travaux ont permis à la recherche de s’intéresser à ce trouble.
On sait aujourd’hui qu’il s’agit d’un trouble neurodéveloppemental et non pas d’une pathologie psychiatrique.
C’est ainsi que furent développées grâce à l’apport des neurosciences comportementales des thérapies comportementales permettant aux enfants et même aux adultes atteints d’autisme de pouvoir accéder à une meilleure autonomie et de s’insérer dans la société.
Parmi ces thérapies nous citerons l’ABA, la méthode de Denver, le programme Son-rise que nous avons déjà abordé dans l’article consacré aux différentes méthodes comportementales.
Des outils de communication ont été développés pour pallier au déficit de langage de nombreux autistes.
La recherche se penche également sur certains mécanismes biologiques pouvant être à l’origine des troubles notamment du fait d’une dysbiose intestinale si fréquente chez les autistes que le lien entre l’alimentation et les troubles autistiques mérite d’être exploré plus profondément.
On a déjà réussi à identifier un certain nombre d’anomalies de séquençage de l’ADN impliquées dans la survenue de l’autisme mais il reste encore à en découvrir bien d’autres. Il est certain que la cause génétique de l’autisme doit être prise au sérieux tant le nombre de cas familiaux est en constante augmentation. On observe par exemple une augmentation de 2 à 18 % des risques d’autisme dans une fratrie où il y a déjà un autiste.
La recherche avance même s’il lui faudra encore beaucoup de temps pour comprendre un trouble aussi complexe que celui du TSA. Il paraît essentiel que l’avenir de la prise en charge de l’autisme soit multifactorielle. En parallèle des thérapies comportementales, il est nécessaire de traiter également l’aspect somatique de l’autisme (dysbiose intestinale, intolérances alimentaires, troubles du sommeil, …) pour parvenir à l’épanouissement de tous les autistes au sein de la société.
Le chemin parcouru dans la prise en charge de l’autisme a été long depuis le développement des théories psychanalytiques jusqu’à aujourd’hui et il reste encore beaucoup de choses à découvrir pour permettre à tous les autistes d’être pleinement acteurs de leur vie. La recherche doit encore travailler afin de mieux comprendre les mécanismes en cause et permettre d’y pallier. Il est souhaitable que cela se fasse dans un avenir aussi proche que possible.